[Dossier] Comment bien motiver vos collaborateurs
Aurait-on oublié que pour dénicher des ouvriers compétents - ou pour les conserver - il faut savoir les motiver ? Avec la baisse du chômage, trouver la perle rare pourrait devenir un défi encore plus grand pour les patrons du monde de l'artisanat...

Les artisans connaissent déjà ce problème : l’inadaptation des formations et le peu d’appétit des jeunes pour les carrières manuelles, métiers qui furent longtemps peu mis en avant par les campagnes de communication du gouvernement, font que trouver un bon ouvrier relève depuis des années de la gageure.

Mais hélas… cela pourrait encore empirer ! Car depuis maintenant quarante ans, le nombre élevé de chômeurs mettait l’artisan en position de force en tant qu’employeur : beaucoup français, surtout les jeunes dont le taux de chômage était au-dessus de la moyenne, avaient besoin de travailler à n’importe quelles conditions. Or cette époque est peut-être bientôt terminée : la France vient de passer sous les neuf pour cent de chômeurs, bien loin déjà des pics au-delà des douze pour cent des années quatre-vingt-dix.

Aux USA c’est encore plus net : le taux de chômage y frôle actuellement les… 3,6 % ! Et plus près de nous, les Allemands ou les Néerlandais connaissent également ce  » problème  » qui ne fait que poindre chez nous. Que vous soyez cordonnier, boucher ou coiffeur, dans certaines villes ou campagnes, la main-d’oeuvre est devenue introuvable. Et par conséquent… la motivation des équipes et leur bien-être au travail sont redevenus un sujet : comment faire venir dans votre affaire les bons employés, et comment les motiver pour les garder une fois qu’ils travaillent chez vous ? Et attention : il ne s’agit pas de simplement proposer un salaire plus élevé… ce dont, de toute façon, vous n’avez peut-être pas les moyens.

Bien sûr, la motivation par la fiche de paye est une réalité. Mais n’oubliez pas qu’à l’époque des Trente Glorieuses, lorsqu’il y avait de l’argent à dépenser, les petits patrons ne motivaient pas seulement leurs troupes en augmentant les salaires : ils avaient, sans tambour ni trompette, spectaculairement amélioré les conditions de travail. La dureté épouvantable, par exemple, du travail dans les tanneries des années 1910 n’existait déjà plus en 1960. Et le menuisier de 1900 joué par Serge Reggiani dans  » Casque d’or « , qui dormait sur un grabat, paraissait préhistorique en 1970 !

Remontons plus loin encore dans le temps : peu d’entre nous savent qu’avant le XXe siècle, les artisans et leurs aides étaient très libres de leurs horaires : de nombreuses fêtes religieuses étaient l’occasion de réjouissances, et créaient du lien social. On quittait l’atelier quelques instants pour aller fleurir le saint-patron des orfèvres ou celui des lavandières, et bien des tensions s’apaisaient ainsi.

Aujourd’hui, bien sûr, les recettes ne sont plus les mêmes, mais l’idée demeure : il faut que l’artisanat soit un monde où l’ouvrier se sent bien. Autre idée, également valable autant autrefois qu’aujourd’hui : l’histoire familiale de celui ou celle que vous vous apprêtez à recruter peut compter. Il ou elle n’a pas eu une vie facile, mais est parvenu(e), malgré les embûches, à sortir d’un milieu défavorisé ? Voilà quelqu’un qui sera sans doute animé d’une forte envie de réussir, qui bénéficiera à votre entreprise. Sachez distinguer, parmi les profils des candidats à un poste dans votre entreprise, celui qui apportera son dynamisme parce qu’il a davantage « d’envie » que le voisin.

Motiver vos ouvriers : du gagnant-gagnant

Et sachez que motiver vos travailleurs n’est pas un « mal nécessaire », une obligation de lâcher du lest, contraint et forcé. Car cela bénéficie réellement aux résultats de l’entreprise : un salarié motivé travaille mieux et davantage. Comme le dit, a contrario, un proverbe russe : si tu fais semblant de me payer, je ferai semblant de travailler… Or selon le sondeur américain Gallup, l’économie française perdrait depuis 2016 plus de 60 milliards d’euros par an du fait que les entreprises ne parviennent pas suffisamment à impliquer et à motiver leurs salariés !

Alors en pratique : comment faire ? Pourquoi un salarié acceptera-t-il d’investir dans la tâche qu’on lui confie non seulement son temps et son énergie mais, mieux encore, sa créativité, une qualité si importante quel que votre type d’artisanat ? D’après une étude (1), la première motivation des employés est de travailler dans une bonne ambiance, avec des gens agréables.

Témoignage

« La clef, pour motiver les troupes, c’est l’humain ! »

Comme partout, la paye est un élément déterminant de la motivation des salariés chez Génie Therm. Or ici, la proximité du Luxembourg et ses salaires très élevés crée une concurrence très rude ! « Alors pour attirer les bons ouvriers, on fait tout pour qu’ils se sentent bien. Par exemple pour le repas du midi j’ai créé un réfectoire, chauffé et avec une télé, alors que beaucoup de salariés d’autres boîtes sont obligés de manger dans le camion », explique Fabrice Cadinu.

Une convivialité qui bénéficie à l’esprit collectif, et à la productivité. De plus, bien avant que cela ne devienne obligatoire, Fabrice proposait une mutuelle. « Je suis aussi cool pour les dates de congés, et je me débrouille pour que les chantiers ne soient pas trop loin, afin que les employés ne restent pas coincés dans les embouteillages le soir pour rentrer chez eux ». Côté salaire, l’entreprise offre tout de même jusqu’à 2 500 € nets pour un travailleur confirmé. « Mais la clé de la réussite pour motiver les troupes, ça reste la prise en compte de l’humain », précise le dirigeant.

REPÈRES

Raison sociale : Génie Therm

Activité : Génie thermique, chauffage, salle de bains

Siège social : Réhon (Meurthe-et-Moselle)

Date de création : 2003

Dirigeant : Fabrice Cadinu, 50 ans

Effectif : 11 personnes

CA : 1,2 M€

Soyez sympa, tout simplement ! Et c’est aussi à vous, en tant que patron, d’encourager (et de recruter) les caractères aimables. Et, si possible, de penser aux petits conforts quotidiens qui changent tout. Comme l’a fait Fabrice Cadinu, dirigeant de la société Génie Therm, en créant un réfectoire avec la télé pour ses chauffagistes qui, auparavant, mangeaient dans leur camion à midi, dans le froid l’hiver et avec le soleil qui tape sur les tôles l’été…

Le deuxième moteur de la motivation des employés est le fait qu’ils ont l’impression de faire quelque chose de bien, que leur travail est utile. En tant qu’artisans, vous avez la chance de jouer ici sur du velours, car vous appartenez à un domaine où l’on crée de ses mains. Statistiquement, le nombre de dépressions y est moins élevé que dans les métiers  » virtuels « , comme la communication ou certaines administrations, où l’on ne  » fabrique  » rien de visible.

Misez donc à fond sur cet atout ! Qu’il s’agisse d’un apprenti, ou d’un employé de longue date, il faut dire souvent à vos employés qu’ils fabriquent quelque chose et que cela change la vie des gens. Montage d’une cuisine ou pose du carrelage d’une salle de bains, la mission reste la même : satisfaire le client ! Neuf fois sur dix, vos employés seront heureux d’un travail accompli pleinement : c’est un puissant carburant. Qu’ils ne perdent pas cet objectif de vue. Et c’est à vous de le leur rappeler si, pris par la routine, ils avaient tendance à l’oublier.

Les encouragements du patron, cela peut paraître puéril, mais ça ne l’est pas : un employé sera toujours heureux d’être soutenu, complimenté sur son travail… et il s’attachera ensuite à ne pas vous décevoir, donc à travailler mieux. C’est à vous de trouver les points positifs. Quitte à ne présenter qu’ensuite vos remarques moins agréables à entendre.

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